Pénibilité au travail : faîtes vos comptes !

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A partir du 1er janvier 2015

Suite à la Loi du 18 décembre 2013 portant réforme des retraites1, la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité est lancée… Le numéro 24 d’Entreprise & Santé (4ème trimestre 2013) a été entièrement consacré à la pénibilité au travail, en apportant un regard global composé de témoignages d’entreprises, de conseils de professionnels de la santé au travail, d’avis d’experts et d’informations générales. Depuis, le parlement a adopté une nouvelle réforme (voir la rubrique « Brèves » de ce numéro) qui impose la mise en place du compte individuel de prévention de la pénibilité, pour chaque salarié concerné, à partir du 1er janvier 2015.

Pénibilité au travail

UN PEU D’HISTOIRE…

2003 loi « FILLON »

Les partenaires sociaux doivent inscrire dans le cadre du dialogue social la question de la prise en compte de la pénibilité. C’est sur la base de leurs travaux qu’une définition légale de la pénibilité a pu émerger dans les textes suivants.

2010 loi « WOERTH »

L’obligation de prévention de la pénibilité, au sein des entreprises, est explicitement inscrite dans le Code du travail. Une définition légale de la pénibilité au travail est écrite et des facteurs de risques sont répertoriés par le Code du travail. Au sein des entreprises, une fiche individuelle de prévention à l’exposition vis-à-vis de ces facteurs de risques doit être établie et actualisée pour chaque salarié concerné. Elle doit être transmise au service de santé au travail, pour être incluse dans le Dossier Médical Individuel de Santé au Travail. Le salarié qui a un taux d’incapacité permanente au moins égal à 10 % peut faire valoir son départ à la retraite dès 60 ans, alors que l’âge légal est de 62 ans.

2013 loi « AYRAULT»

Chaque salarié concerné doit disposer d’un compte individuel de prévention de la pénibilité. Sur la base du nombre de points acquis au cours de sa vie professionnelle, le salarié pourra faire valoir des droits spécifiques, en compensation de son exposition. Ce système se veut incitatif pour le développement de la prévention au sein des entreprises.

A PROPOS DES « FACTEURS DE PENIBILITE »

En son article L 4131-3, le Code du travail donne une définition légale de la pénibilité : « une exposition à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels pouvant laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé ». En 2008, les partenaires sociaux ont retenu 10 facteurs de risques, qui sont intégrés au Code du travail, en son article D. 4121-5. Ces dispositions légales et règlementaires résultent de la loi « Woerth », de novembre 2010.

Au titre des contraintes physiques marquées

Les manutentions manuelles de charges définies à l’article R. 4541-2 ;
Les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;
Les vibrations mécaniques mentionnées à l’article R. 4441-1 ;

Au titre de l’environnement physique agressif

Les agents chimiques dangereux mentionnés aux articles R. 4412-3 et R. 4412-60, y compris les poussières et les fumées ;
Les activités exercées en milieu hyperbare définies à l’article R. 4461-1 ;
Le bruit mentionné à l’article R. 4431-1 ;
Les températures extrêmes ;

Au titre de certains rythmes de travail

Le travail de nuit dans les conditions fixées aux articles L. 3122-29 à L. 3122-3 ;
Le travail en équipes successives alternantes ;
Le travail répétitif caractérisé par la répétition d’un même geste, à une cadence contrainte, imposée ou non par le déplacement automatique d’une pièce ou par la rémunération à la pièce, avec un temps de cycle défini.

ET MAINTENANT

La loi « AYRAULT » de décembre 2013 institue le compte personnel de prévention de la pénibilité. En fonction de son exposition aux facteurs de pénibilité, inscrits au Code du travail par les lois précédentes, le salarié acquiert des points tout au long de sa vie professionnelle. Ces points lui ouvrent différents droits. Les éléments ci-dessous sont livrés à titre indicatif, dans l’attente des décrets d’application à paraître. Ils résultent des travaux préparatoires à la loi.
Dès le 1er janvier 2015, chaque entreprise du secteur privé devrait établir une déclaration annuelle auprès de sa CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail), pour ses salariés exposés à un ou plusieurs facteurs de risque répertoriés par le Code du travail et faisant l’objet de fiches individuelles de prévention des expositions.

Pour chaque trimestre déclaré d’exposition à un facteur de pénibilité, le salarié aurait un point sur son compte personnel de prévention de la pénibilité ; deux points, en cas d’exposition à plusieurs facteurs de pénibilité durant le trimestre.

100 points est le nombre maximal que pourrait contenir ce compte personnel de prévention de la pénibilité.

Les 20 premiers points devraient être utilisés pour une formation professionnelle, permettant d’orienter le salarié sur un poste moins pénible.

Les 80 autres points seraient utilisés par le salarié selon son choix : soit pour obtenir un temps partiel avec complément de rémunération, soit pour obtenir la mise en place d’une retraite progressive ou un départ anticipé à la retraite.

Pour financer ce dispositif : une faible augmentation des cotisations retraite serait appliquée à toutes les entreprises au titre de la mutualisation et une augmentation plus importante des cotisations retraite serait appliquée pour les entreprises concernées par ces « facteurs de pénibilité » répertoriés par le Code du travail.

L’ensemble devrait concourir à développer la prévention. La concertation entre les partenaires sociaux se poursuit pour la mise en place de ce dispositif. Nul doute que les décrets d’application auront une importance capitale ! A suivre…

1. Journal Officiel du 21 janvier 2014, loi N° 2014-20 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

(Publié dans le N°25 : Ca s'est passé près de chez vous!) le 12/02/2014

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