Les solvants

Définition:  un solvant est un produit qui a le pouvoir de :

- dissoudre, diluer, mettre en suspension ou extraire des substances ;

- avec inertie, c’est-à-dire sans modifi cations chimiques réciproques.

Un solvant est en général liquide, mais il peut, sous certaines conditions, être utilisé à l’état gazeux.

Solvants, de quoi parle-t-on ?

Source

 Actuellement deux sources principales coexistent :

  • Solvants issus de la pétrochimie (ex. : hexane, benzène, acétate d’éthyle, dichlorométhane, etc.).
  • Solvants agro-sourcés ou bio-solvants issus de la valorisation de la biomasse végétale (ex. : furfural, glycérols, lactate d’éthyle, etc.).

L’origine ne présage en rien de la toxicité humaine. La notion de « solvant vert » ne repose pas sur une définition officielle ; elle signifi e que le produit a été élaboré selon les huit principes de la chimie verte.

Usages

Les usages sont multiples, professionnels… et domestiques !

  • Dilution et dissolution
  • Extraction et Purifi cation
  • Nettoyage
  • Dégraissage
  • Décapage

Activités

Les solvants sont présents dans de nombreuses entreprises, de toute taille et toute activité.

  • Synthèse organique : chimie de base, parachimie, pharmacie (agent d’extraction, de séparation, de dilution)
  • Traitement des métaux
  • Traitement Phytosanitaire
  • Plasturgie et fabrication du caoutchouc
  • Imprimerie
  • Elaboration de peinture et d’encres
  • Peintures et revêtements
  • Nettoyage des locaux, détergence, entretien
  • Nettoyage à sec, blanchisserie
  • Funéraire
  • Artisanats divers (collage, assemblage, nettoyage, décapage, dégraissage…)
  • Laboratoires de recherche et d’enseignement

Etc.

Produits

Les solvants sont très nombreux. Plus d’un millier ! Devant leur toxicité, tant pour l’homme que pour l’environnement, de nouvelles générations de produits apparaissent…

  • L’eau, bien sûr !
    • A l’état pur…
    • Avec des colorants
    • Avec des tensio-actifs
    • Avec des agents lessiviels

  • Les solvants oxygénés
    • Alcools : éthanol, n-butanol, isopropanol, méthanol,…
    • Acides : acide acétique,…
    • Esters : acétates d’éthyle, de butyle, d’isobutyle, de propyle, d’isopropyle,…
    • Cétones : acétone, méthyléthylcétone, cyclohexanone, …
    • Ethers de Glycols : acétate de 1-méthoxy-2-propanol, 1-méthoxy-2-propanol,…
    • Ethers : tétrahydrofurane, éther diéthylique ,…
    • Autres : DMF, DMSO, HMPT,…

  • Les solvants hydrocarbonés
    • Aliphatiques : white-spirit, essences de pétrole,naphtas, isopentane,…
    • Aromatiques : xylènes, toluène, benzène, éthylbenzène,…
  • Les solvants hydrocarbonés halogénés
    • Chlorés : chlorure de méthyle, chlorure de méthylène, chloroforme, tétrachlorure de carbone, trichloréthylène, perchloréthylène ou tétrachloréthylène,…
    • Fluorés
    • Bromés
    • Iodés

Hit-Parade

Le principal solvant employé est l’eau qui est de plus en plus utilisée dans de nombreux secteurs industriels, comme celui des peintures ou en association avec des lessives et des tensioactifs dans le dégraissage des métaux, en remplacement d’autres solvants. La consommation mondiale de solvants, autres que l’eau, est, en 2012, au 2/3 de solvants oxygénés, à 25 % d’hydrocarbures et 5 % de solvants chlorés._ Source : societechimiquedefrance.fr_

Danger ou risque

En pratique, les deux notions sont importantes à distinguer :

  • Le danger décrit la propriété intrinsèque d’un produit ou d’une substance. Par exemple, l’acide chlorhydrique a des propriétés décapantes et corrosives importantes. Il peut y avoir danger pour la santé, la sécurité, le milieu de travail, l’environnement….
  • Le risque décrit l’effet indésirable ou nocif dans une situation donnée et concrète dans lesquelles entrent en jeu le degré et les modalités d’exposition. A titre d’exemple « caricatural », l’ingestion d’eau de javel pure présente un risque de brûlure de l’oesophage très élevé ; très dilué, le risque diminue ; il peut être nul : c’est le cas du Dakin pour désinfecter les plaies ! Le risque résulte de la combinaison du danger et des conditions d’exposition…

Effets des solvants sur la santé

Les solvants présentent des risques très variables selon le produit et les circonstances :

  • Inhalation en quantité élevée suite à une fausse manœuvre ou chiffon imbibé laissé sur place…
  • Ingestion accidentelle, suite à erreur de façonnage…
  • Projection oculaire accidentelle.
  • Contact cutané trop élevé sur un instant très court (ex. : lavage des mains aux solvants).
  • Contact cutané prolongé suite à un usage régulier sans précautions particulières.
  • Inhalation régulière suite à un usage régulier sans précautions particulières.
  • Etc.

La peau est par définition la première protection qui « saute », lors de contact avec un solvant. Elle se fragilise et favorise toute lésion (ex. irritation cutanée, voire eczéma). L’absorption cutanée d’autres toxiques est alors facilitée.

Tableau

Solvants, y penser…

Le produit ou le processus ?

Quand on pense « danger des solvants », on pense bien sûr aux produits manipulés. En pratique, le danger peut aussi provenir du processus de travail lui-même. Exemple : chauffage, exposition aux Ultra-Violets, décantation, etc. Le danger devient un risque !

Et ça s’évapore !

La plupart des solvants sont volatils. Ils passent donc dans l’air que l’on respire, sous forme de vapeurs invisibles. Puis dans nos poumons. Et donc dans notre sang. De là, ils diffusent dans tout l’organisme…

Et en plus, des aérosols ?

De nombreux solvants émettent des microgouttelettes…Attention lors des manipulations et des processus de travail, ces microgouttelettes se déposent sur la peau ou sont inhalées. Comme un aérosol classique tel celui d’une bombe insecticide, par exemple ! Retour à la case départ sur les risques respiratoires ou cutanés…

Attention aux inhalations massives ou insidieuses…

Il faut faire très attention aux inhalations massives qui résultent de circonstances accidentelles. Mais aussi des inhalations liées à des circonstances particulières : lieu clos et non aéré en raison du froid, facon non refermé, transvasement, etc. Les solvants demandent une précaution de tous les instants.

Et en cas de projection accidentelle dans les yeux…

Savoir rincer à l’eau claire immédiatement et abondamment l’oeil concerné (ou les yeux concernés). Il peut s’en suivre une conjonctivite passagère.

Et les déchets ?

600 000 tonnes de solvants usés sont produites chaque année en France (source : Ademe.fr). 65 % sont dans des produits fnis (peintures, vernis et encres, fabrication de produits chimiques et de principes actifs). 110 000 tonnes de solvants usés aboutissent à la remise sur le marché de 80 000 tonnes de solvants régénérés. Les déchets issus de la fabrication et de l’utilisation de peintures représentent 100 000 tonnes par an en France.

Ne pas se laver les mains avec un solvant

Il ne faut surtout pas se laver les mains avec des solvants. La tentation est grande, car cela peut paraître plus effcace. C’est surtout plus toxique !

Attention à la peau !

Les solvants dissolvent le flm de sébum qui protège la peau. La porte est alors ouverte aux irritations, aux lésions… De la simple rougeur éphémère à l’eczéma durable, tout est possible. La peau fragilisée laisse passer d’autres substances. Amicales ou inamicales…

Etiquetage

Bien-sûr, les règles relatives à l’étiquetage sont essentielles. L’étiquette est une source d’information très précieuse. Elle relève d’une règlementation internationale, dénommée « CLP », qui s’applique à la classifcation, l’emballage et ’étiquetage des substances et produits chimiques. Voir à ce propos Entreprise & Santé n° 13 (1er trimestre 2011) et n°14 (2ème trimestre 2011).

Les Fiches de Données de Sécurité…

Le fabricant et/ou le distributeur doit donner la Fiche de Données de Sécurité correspondant à chaque substance ou produit qui entre dans une entreprise. C’est une obligation. Il faut donc la demander… Et l’obtenir. La Fiche de Données de Sécurité contient les informations relatives à la sécurité et aux risques pour la santé.

Et les COV ?

Entre autres sources, les Composés Organiques Volatils peuvent résulter de l’évaporation de certains solvants organiques. Ces composés ont la particularité de diffuser dans l’atmosphère…Ils peuvent alors être précurseurs des gaz à effet de serre. Une émanation locale peut donc avoir un effet général…

VLCT et VLEP ?

Dans certaines situations de travail, il peut être opportun d’effectuer des dosages atmosphériques afn de vérifer la qualité de l’air… Des valeurs seuils à ne pas dépasser sont fxées par la règlementation (Articles R.4412-149 et R. 4412-150 du Code du travail) et/ou des normes ou références. On parlera de Valeurs Limites à Court Terme si le dosage mesure un niveau d’exposition sur 15 minutes. On parlera de Valeurs Limites d’Exposition Professionnelles si le dosage mesure un niveau d’exposition sur 8 heures.

Et les HAP ?

Derrière le sigle HAP, se cache un nom énigmatique : Hydrocarbure Aromatique Polycyclique. Dans le milieu naturel, ils se retrouvent à des taux important dans les émanations résultant des éruptions volcaniques. En milieu domestique ou industriel, ils se retrouvent dans les processus de transformations et/ou de combustions, dans des conditions de déficience en oxygène, des produits fossiles : moteurs automobiles (diésel), processus industriels, chauffages domestiques. Plusieurs HAP sont classés « Cancérogènes pour l’homme » par le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer). Ils se retrouvent sous formes particulaires ou volatiles dans l’air respiré… Prudence donc avec les solvants et produits pétroliers qui peuvent générer des émanations d’Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques, notamment au cours des processus de fabrication.

Et aussi…ne pas mélanger !

Le mélange peut faire croire à plus d’effcacité. Il provoque, en général plus d’émanations par réactions chimiques, sans gagner en effcacité sur l’effet solvant ou décapant. Le « grand classique » est le mélange détartrant acide et eau de javel… qui dégage un nuage de chlore qui peut être mortel ! Plusieurs dizaines de cas par an, en France, sont pris en charge par les Centres Anti Poison et les services d’urgence…

Agent Chimique Dangereux et « CMR »…

Certaines substances ou produits, « en l’état ou au sein d’un mélange, en rai son de leurs effets observés sur la santé de l’homme ou de l’animal, sont qualifés d’Agents Chimiques Dangereux ( ACD) à l’article R.4412-3 du code du travail. Ceux-ci comprennent notamment les agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la r eproduction (CMR) défnis à l’article R .4412-60 du Code du travail. Les ACD peuvent être produits ou utilisés de façon volontaire. Ils peuvent aussi être émis au cours d’un procédé (poussières, fumées, vapeurs, etc.) ou être indissociables de l’activité de l’entreprise sans qu’ils soient générés par cette activité (fumées diesel pour agents de péage d’autoroute) ». Source : travailler-mieux.gouv.fr

Risque CMR et Principe de substitution

Le Code du travail rend obligatoire ce principe de base face aux produits et substances CMR au sein des situations de travail : « Lorsque l’utilisation d’un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction est susceptible de conduire à une exposition, l’employeur réduit l’utilisation de cet agent sur le lieu de travail, notamment en le remplaçant, dans la mesure où cela est techniquement possible, par une substance, une préparation ou un procédé qui, dans ses conditions d’emploi, n’est pas ou est moins dangereux pour la santé ou la sécurité des trav ailleurs. L’employeur consigne le résultat de ses inv estigations dans le document unique d’év aluation des risques » (article R4412-66). Voir à ce propos Entreprise & Santé n° 17 (1er trimestre 2012) dont le dossier est consacré aux produits cancérogènes et l’obligation de substitution.

Femme enceinte : attention, prudence !

Du fait que les solvants passent sans difficulté la barrière placentaire, il faut donc être particulièrement vigilant sur le respect des règles et consignes de prévention en cas de grossesse.

(Publié dans le N°27 : Les solvants sont partout...) le 11/08/2014